La France sur le pouce, Olivier Courtois, Phicil, Dargaud

La France sur le pouce, par Olivier Courtois et Phicil: enfin une bd qui nous transporte!

Parfois, on se contente de lire un album pour son dessinateur, parce que son travail nous plaît. On ne se soucie pas du scénario, on se dit qu’on verra bien. Parfois, ça ne passe pas et on s’ennuie. Mais là, en l’occurrence, je suis sorti de cette lecture complètement enchanté. Si vous voulez lire une bande dessinée au sujet décalé mais qui vous donne la banane, c’est bien La France sur le pouce!

Désormais, il est nomade…

Olivier Courtois est un journaliste qui a décidé de mettre en pause une vie battant de l’aile. Une séparation, une démission et le voilà avec le sentiment qu’il y avait peut-être quelque chose à tester avant de revenir au « couple-CDI-crédit ».
Le voilà donc au départ de Lyon, pour un périple à travers la France qu’il fera à la seule force du pouce.
En auto-stop. Sans plus d’urgences, sans plus d’attaches. Mais avec toujours autant de questions et le désir de rencontrer de nouvelles personnes.

La France sur le pouce: et vous oseriez-vous?

Fantasme ou peur? Tout laisser derrière soit, oublier ses responsabilités, ne plus avoir d’engagement… Il y a évidemment quelque chose d’attirant là dedans. Mais si on y pense tous un jour en passant, rare sont ceux qui oseront franchir ce pas. Quoi qu’on en dise, cette forme de liberté assumée angoisse.

Alors, Olivier Courtois nous permet de vivre par procuration ce défi humain, grâce à cet album.
Qu’est-ce que c’est que de choisir de se mettre en marge de la société, à quoi ça ressemble? Etre le témoin des bonheurs, des colères ou des renoncements de ceux qui s’y trouvent, ça fait quoi? C’est tout cela que nous montre cet album.

Mais Olivier Courtois, s’il ne juge pas, n’est pas pour autant un témoin neutre et froid. Il parvient toujours à créer du lien avec les personnes qu’il donne à lire. Même pour ce trio encapuchonné qu’il rencontré une nuit. Ils deviennent de mystérieux personnages, peut-être des truands, ou des terroristes. Ou rien de tout ça. On ne sait pas, mais on vibre avec lui.

De l’importance de la narration dans un récit en bande dessinée

Entendons-nous bien. 164 pages de ballades de discussions en voiture sur les routes de France, cela avait tout du pensum, à la base.
Alors pourquoi ce livre est-il si addictif, si plaisant à lire?
Tout tient à la narration, aux choix faits par le duo d’auteurs, afin que jamais le lecteur ne se lasse.

Il y a le découpage en chapitres déjà. Une rencontre, un lieu, un chapitre. Cela crée déjà un rythme entraînant.
Et puis il y a le découpage de chaque séquence. Phicil n’hésites jamais à représenter ce qui se passe en dehors de la voiture, Olivier Courtois a connu suffisamment d’expériences permettant de sortir de ce huis-clos. Comment ne voulez-vous pas que je m’enthousiasme quand le personnage se retrouve sur les côtes bretonnes à cheminer et que Phicil en fait une illustration sublime? Il y a des moments touchants ou poétiques, dans ces sorties.
Et quand le personnage est coincé dans la masse de métal, c’est la symbolique qui prend place pour nous en sortir. Comme cet automobiliste assis sur un divan, représentant le héros le psychanalisant par leur discussion commune.

La France sur le pouce: la touche Phicil

J’ai commencé à l’évoquer, mais je suis convaincu que nombre de ces choix sont l’oeuvre de Phicil, quand il réalisa le découpage du scénario d’Olivier Courtois. Et déjà, c’est fort.

Mais croyez bien que le dessin de Phicil est aussi pour beaucoup dans le lien qui se crée entre ces personnages et nous. Son trait, autant que sa mise en couleur. Il y a quelque chose d’harmonieux, d’apaisant, dans la richesse des pages qui nous sont proposées. Or, cette paix apporte un contrepoint formidable à l’angoisse dont je parlais au tout début de cette chronique. Amenant le récit à une forme d’équilibre.
La situation nous paraît réaliste, mais jamais sombre. Les angoisses ne sont pas cachées, mais elles ne sont pas oppressantes.

On est juste dans une forme de bien être.
Observez simplement les couleurs de la couverture, leur douceur. On est en confiance dès ce premier moment.

Le fantasme restera un fantasme

Vous je ne sais pas, mais moi je sais que je ne franchirai pas le pas qu’a franchi Olivier Courtois. Le fantasme perdurera. Mais entre temps sera venue la lecture de cet album. Et j’aurai vécu des choses par procuration qui me feront regarder encore différemment ceux qui auront fait ce choix. Merci aux auteurs pour ce beau voyage immobile.

ET SI ON DONNE UNE NOTE?

18.5/20

 

Titre: La France sur le pouce
Scénariste: Olivier Courtois
Dessinateur: Phicil
Coloristes: Phicil, Reiko Takaku, Drac
Editeur: Dargaud
Date de publication: Mars 2017
Nombre de pages: 164

La Bande Dessinée qui met sur les routes

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