Amère Russie tome 2- Les Colombes de Grozny (Mardi Chronique)

Série: Amère Russie
Tome: 2
Titre: Les Colombes de Grozny
Scénariste: Aurélien Ducoudray
Dessinatrice: Anlor
Editeur: Grand Angle
Date de publication: 27 mai 2015

Il y a un an, je vous faisais découvrir la première partie du diptyque Amère Russie, nous voilà donc avec la conclusion de cette belle histoire. Impossible pour moi de ne pas répondre présent une fois de plus.

Ekaterina, mère d’un soldat russe réputé fait prisonnier en Tchétchénie, a fait le déplacement jusque dans cette région ravagée dans l’espoir de récupérer son fils. Elle pensait que le leader des Tchétchène assurait des échanges de prisonniers, mais la réalité est plus que décevante. Désormais prisonnière du terrible Bassaïev et transférée dans la ville de Grozny, elle pourrait bien servir de monnaie d’échange médiatique. Si l’un des deux camps voulait bien faire preuve d’un peu de générosité… En attendant, elle découvre la vie dans l’ancienne capitale de la région. Entre bombardements et snipers. Pourtant, une vie demeure.

J’ai profité de l’occasion pour relire le tome un, pour enchainer avec ce tome deux, et je dois dire que j’aime beaucoup cette histoire. Aurélien Ducoudray s’assure qu’elle soit riche en rebondissements et en même temps en enseignements sur la réalité de cette guerre qui n’est toujours pas terminée aujourd’hui. Comme un documentaire qui aurait été réalisé par des témoins de première main, et pourtant c’est un récit romancé… On a la force de la vérité d’un côté, la douceur du personnage principal de l’autre. Ekaterina et son petit chien sont des bouffées d’air dans ces ambiances tendues. Que ce soit lorsqu’elle vend une kalachnikov à un islamiste ou lorsqu’enfin elle retrouve son Volodia, son fils. Sans elle, le récit serait sombre et cruel. Mais le personnage emporte tout. C’est une belle trouvaille, un très joli témoin, qui donne à voir autant qu’elle amorti le choc. Et Volodia… ah ça, depuis le temps qu’on en entend parler du fier soldat russe… Les retrouvailles sont inattendues, très malines de la part de Ducoudray, qui donne aussi à voir la différence entre les espoirs des mères de soldats, et la réalité de ce que sont devenus leurs fils. Les traumatismes de la guerre, la haine à mort de l’autre érigée en doctrine. Il n’y a pas que les soldats américains qui en soient victimes, même si ce sont souvent eux les sujets d’études de ce genre de questionnement.

La force d’Ekaterina, elle se trouve dans son écriture, mais elle se trouve aussi dans son interprétation graphique. Le dessin d’Anlor joue sensiblement les mêmes rôles que leur héroïne. Ce livre est à l’image de la couverture, petit bijou de composition. Noir, sombre, mais aussi plein de poésie ou de banal quotidien. Et la dessinatrice met tout cela en scène avec la même aisance. Elle crée l’harmonie, assure l’unité globale du récit. La violence comme l’humour, elle les donne à voir grâce à son trait qui parvient à assumer les deux. Elle conjugue vraiment tous les atouts nécessaires pour cette histoire.

Voilà donc un très beau récit en deux tomes que vous ne devez pas hésiter à découvrir. Il sera aussi distrayant qu’émouvant ou instructif. De la belle bd grand public intelligente. Juste ce que j’aime lire, pour ma part. Et ce qu’un très large public devrait pouvoir apprécier aussi.

ET SI ON DONNE UNE NOTE?
17.75/20