Ladyboy vs Yakuzas tome 2, Sakuraï, Editions Akata

Ladyboy vs Yakuzas tome 2

Série:Ladyboy vs Yakuzas
Tome: 2
Auteur: Toshifumi Sakurai
Editeur VO: Futabasha Publishers ltd
Editeur VF: Editions Akata
Date de publication VF: Avril 2014

Voilà bien une série que je n’imaginais pas revoir dans ces colonnes, tant j’avais pensé le plus grand mal du premier tome. Mais il se trouve qu’avec Hervé Beilvaire, nous avons fait la rencontre à Angoulême du directeur général d’Akata, avec qui nous avons pu discuter de cette série. Et il m’a mis le doute. Il vendait ce récit comme une critique acerbe de la société japonaise, que je n’avais pas du tout perçu, pour ma part. Mais ma faute, d’après lui, avait été de m’arrêter au tome 1, et de ne pas percevoir la série dans sa globalité. Alors soit. Je suis parti avec sous le bras les trois tomes suivants de la série, histoire de voir ce que ça pouvait valoir sur la longueur. Je ne vous le dit pas tout de suite, mais vous voyez bien que je reviens vous en parler. Ce doit être un signe.

Kozo le Yakuza, a eu le malheur de se taper la femme et la fille de son boss. En punition, il a été opéré pour être changé en femme, et lâché sur une île perdue avec cent pervers sexuels qui ne pourront partir qu’en le violant. Mais Kozo s’est vu offrir une porte de sortie par son boss. Car son père est présent sur l’île… Et si Kozo couche avec lui, alors il pourra partir. Et s’il reste, il lui faudra tout de même survivre à un gourou extrêmement malin, ou à un monstrueux handicapé.

LA LIE DE LA SOCIETE JAPONAISE

Ce tome 2 m’a semblé moins insupportable à lire que son prédécesseur. Je ne crois pas que ce soit une question d’accoutumance à l’horreur, je pense que Toshifumi Sakurai avait délibérément chargé la barque sur ses premiers chapitres. Il y a moins d’éléments délibérément horribles, purement gratuits. Et pour tout dire, arrive aussi la première condamnation explicite du viol. Car oui, Kozo va finir par se faire violer. Et on assiste à la scène. Mais en partageant avec nous les pensées de la victime, l’auteur démonte le mécanisme du viol, du point de vue de la victime. Kozo, dans cette situation, n’est pas une salope qui l’a bien cherché, comme peuvent le théoriser certains mâles à l’esprit limité. Outre que la situation fait d’elle une victime, c’est parce qu’il a été trompé par son violeur, abusé dans sa confiance, que l’acte advient. Et Kozo n’en tire aucune jouissance. L’auteur a donc attendu que l’acte advienne pour nous donner à lire ce qu’il en pense. Tardif, mais fort bienvenu.
Et tout le reste de l’album reste dans cette tonalité. Dans une forme de dénonciation des rapports sociaux au Japon. God, c’est la manipulation des plus fragiles psychologiquement à travers la religion. Lion, c’est la question de l’avortement qui est niée au Japon, autant que la gestion des personnes en situation de handicap. Et puis il y a la question du père, mise en avant à travers celui de Kozo, et le boss yakuza. Les deux sont dysfonctionnels, abusifs envers leur enfant. Pourtant l’un d’entre eux semble capable de remise en question. L’immonde salopard ne l’est plus tout à fait. Des nuances qui font du bien.

VIOLENCE ET TABOUS

Le dessin de Toshifumi Sakurai n’a pas particulièrement changé, lui, entre les deux recueils. Il continue de cultiver un dessin outrancier, avec des tronches ignobles et des corps difformes. Et il nous montre tout des situations trashs qu’il met en scène.
Non, en fait, pas tout, et cela m’amuse. Alors que le propos est extrêmement violent, que les scènes sont brutales et parfois difficiles à supporter, l’auteur floute avec pudeur les sexes en érection, et place une petite bande chaste sur le sexe féminin de Kozo. Comme quoi, la provocation a ses limites, et l’auteur reste tout de même engoncé dans les codes et les tabous japonais concernant la représentation des sexes. Paradoxal…

 

Maintenant, je peux le dire plus directement, je vais continuer à lire et donc à chroniquer, Ladyboy vs Yakuza. Je perçois bien mieux les intentions de l’auteur. Mais je reste convaincu que s’il avait apporté dès le premier recueil, les nuances qu’il place dans ce deuxième, il aurait perdu moins de lecteurs. Violenter le lecteur sans lui donner à comprendre les intentions de l’artiste, ça reste pour moi une mauvaise idée. Il n’est pas interdit d’aider le lecteur à faire des efforts, quand on propose une œuvre vraiment particulière.

ET SI ON DONNE UNE NOTE?

16.5/20

Ladyboy vs Yakuzas tome 2_ planche

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