Ainsi se tut Zarathoustra (Samedi One-shot)

Ainsi se tût Zarathoustra

Titre : Ainsi se tut Zarathoustra

Auteur : Nicolas Wild

Editeur : La Boîte à Bulles

Collection : Contre-coeur

Date de publication : Mars 2013

C’est pendant le festival de Quai des Bulles, directement sur le stand de La Boîte à Bulles, que j’ai découvert ce nouvel album de Nicolas Wild, un auteur qui s’était fait remarquer avec le diptyque Kaboul Disco à l’époque où Guy Delisle commençait à mettre sous le feu des projecteurs le récit engagé de voyage en bd. Wild avait su tirer son épingle du jeu, mais je n’avais pas tellement fait attention à la suite de sa carrière. Il n’était pas à St Malo, mais Jordanne, salariée de la maison d’édition, m’a mis sous le nez cet album que j’avais raté à sa sortie. Le sujet m’intéressait, l’auteur me convenait et semblait avoir progressé, je suis donc parti de la cité malouine avec le livre dans mon sac.

A son retour d’Afghanistan, Nicolas Wild s’installe quelques temps à Paris chez un ami resté lui dans ce pays. Du côté du canal Saint Martin, un quartier très fréquenté par les immigrés afghans, avant leur départ pour l’Angleterre. Il y fait la rencontre d’un clandestin et de son amie franco-iranienne. De fil en aiguille, Nicolas Wild se fait inviter par la jeune femme pour un voyage qu’elle organise en Iran, afin de faire connaître la culture zoroastrienne, que défendait son père, un célèbre intellectuel tout juste assassiné.

Indéniablement, Nicolas Wild a progressé avec les années, sur la forme comme sur le fond.

Son dessin, d’abord, se fait beaucoup plus affirmé dans le trait. On sent qu’un niveau supérieur a été franchi, on sent une certaine assurance. Les cases se font plus richement illustrées, et si les personnages sont parfois un peu simplifiés, le souci du détail pour les lieux, pour les décors, traduit bien cette maîtrise graphique. Je manque toujours un peu de mots pour décrire un dessin, retenez donc cette idée de progression.

Et sur le fond, ce récit romancé mais basé sur des faits réels est à la fois intéressant et instructif. On ne sait rien du Zoroastrisme, alors que c’est manifestement la religion qui a inspiré les trois religions du Livre, qui lui sont postérieures. Et de là on interrogera la révélation que constituent ces trois religions, qui sont toutes censées détenir la vérité vraie. Mais je dévie légèrement, alors revenons au zoroastrisme. Ce thème permet à Nicolas Wild de brosser un tableau contemporain, adulte et  distancié sur l’Iran, ce qui pouvait manquait un peu à l’œuvre de Marjanne Satrapi, Persépolis (œuvre avec bien d’autres qualités, ceci dit). Et malgré le coup de projecteur donné par l’œuvre de la bédéiste devenue réalisatrice, je dois bien reconnaître que nous avons encore beaucoup à apprendre d’un pays à l’histoire visiblement TRES riche. Cyrus Yazdani, la figure traitée en fil rouge, est un formidable personnage qui nous donne réellement envie de nous intéresser au propos de l’auteur. Il va être maintenant intéressant de fouiner sur la toile pour découvrir ce qui tient de l’invention de Nicolas Wild, de la fiction, et ce qui tient de la réalité.

C’est en tous cas une formidable porte qu’ouvre l’auteur sur une culture trop méconnue en France aujourd’hui. Il propose un regard sans complaisance, mais marqué dans les chairs que fût celui de Satrapi, qui avait vécu tout cela. Cette distance est vraiment utile. Elle n’empêche pas l’auteur de dénoncer, mais nous permet de voir toute la complexité de l’Iran et de ses habitants. Un vrai bon point pour cet album assez logiquement sélectionné pour le prix du meilleur album à Angoulême 2014. Une très bonne découverte.

Ainsi se tût Zarathoustra_ planche

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