Abaddon tome 1 (La BD du Mercredi)

Titre: Abaddon

Tome: 1

Auteur: Koren Shadmi

Editeur VF: Ici-même

Date de publication: 2e Trimestre 2013

Abaddon est un album que j’ai vu passer sur plusieurs blogs, mais dont la couverture ne m’attirait vraiment pas du tout. J’ai survolé les chroniques en questions, et il était visible que les lecteurs sortaient marqués de cet album. Aussi, lorsque je l’ai trouvé en bibliothèque, je l’ai pris sans réfléchir. Pour voir ce qui avait bien pu tant intéresser certains comme Yvan, dont j’estime particulièrement les avis. Il fallait que je me fasse une idée malgré mes premiers ressentis frileux.

Un homme frappe à la porte. Il vient visiter un appartement, une colocation, afin d’y prendre une chambre. Son prénom? Il a du mal à s’en souvenir. Ter, ça doit être ça… en tous cas, la colocation semble agréable. Il y a Bet la bimbo, Vic le grand baraqué, Shel la grosse à lunette  et Nor l’asocial artiste amoureux fou de Shel. Ter accepte la place et commence immédiatement la vie en collectivité. Mais il se passe des choses bizarres. Les lumières ne s’éteignent pas. Et Vic semble être un sociopathe prêt à passer le chat de la maison au broyeur à ordures. Ter veut partir. Il refuse de rester dans cette ambiance. Mais à son grand étonnement, il n’y a pas de serrure sur la porte, qui refuse de s’ouvrir malgré ses tentatives appuyées. Mais où est-il tombé?

Étonnant, étrange, prenant. Je comprends mieux les différents avis lu ici ou là. Abaddon est un ouvrage qui se laisse difficilement percer à jour, mais qui nous emporte pourtant dès la première page. Je ne sais toujours pas pourquoi, mais je me suis retrouvé pris au piège comme l’est Ter. Englué dans une histoire malsaine, sans réponses, sans explications, mais incapable de m’en sortir avant la fin de l’album. Avec Koren Shadmi, il faut essayer de comprendre par soi-même, il ne livre pas les clés d’analyse. Qu’est-ce que cet appartement? Quel est ce gel rose fluorescent qui s’écoule des tuyauteries? Qui remplit le frigo sans que personne ne le voit jamais? Pourquoi n’ont-ils pas faim? Sont-ils même vivant? Shadmi sème quelques pistes tout de même, mais ne vient surtout pas nous indiquer si elles peuvent être fiables. On ne saura pas pourquoi Ter ne ressent pas la jouissance, pourquoi Bet a besoin de se faire cogner dessus pour y parvenir, et pourquoi elle prétend qu’ils sont tous des fantômes. Ca, ou autre chose… Il faut accepter de ne pas savoir, de tirer des hypothèses qui resteront insatisfaites à la fin de l’album (fin qui rajoute de nouveaux éléments à décortiquer). Sacré pari de la part de Koren Shadmi. Mais un pari réussi.

Ce scénario complètement dingue est bien soutenu par un dessin légèrement caricatural, mais très précis. Shadmi fait simple mais pas simpliste. Il travaille beaucoup sa gamme de couleur étrange, ainsi que ses lumières qui font réellement partie de la scénographie de l’histoire. J’apprécie ce trait un peu brut, cette façon de travailler les ombres sans aplats. Technique idéal pour un univers qui sème le doute et qui cherche à perdre un peu son lecteur.

Très bonne découverte, donc, au final, je ne regrette pas d’avoir osé le prendre. Je sauterai sur le tome 2 avec l’espoir de trouver des réponses, où alors de retrouver ce même sentiment de mélasse dans lequel je me suis retrouvé plongé. Une expérience à vivre, assurément.

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